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Batman

Notre héros peut-il être amoureux?

Slimybug dans son analyse de la trilogie Dark Knight de Christopher Nolan arrive à cette conclusion: « Many superhero films, including the first two films in this series, are about facing responsibility and obligations to others. The Dark Knight Rises is unique as a film in that it is about hero needing to love himself. » (Slimybug, « The Themes And Meanings Of THE DARK KNIGHT Trilogy », www.comicbookmovie.com, January 14, 2014).

Pour Chris Sims, il peut s’agir d’un pari risqué d’un point de vue narratif : « But the thing is, as much as they don’t work from a romantic perspective, which is the nature of dramatic tension, they don’t really work from a storytelling perspective, either. » Et ces amoureuses seront pratiquement toujours des personnages de soutien au service du héros, sans reelle existence (Chris Sims « Ask Chris #212: The Many Loves Of Batman », www.comicsalliance.com, September 12, 2014).

Dans ces circonstances, tout l’équilibre de la rédaction est de donner une existence propre à la maîtresse sans que son rôle ne se limite à devenir la demoiselle en détresse ou l’agneau sacrifié. Ce piège peut être évité dans un film de deux heures, mais il devient plus difficile à réaliser dans une série de longue durée.

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Les idées flottent dans l’air – Partie I

Il est difficile aujourd’hui de créer quelque chose de fondamentalement original. Stanley Kubrick aurait déjà dit à Jack Nicholson : « Tu sais, d’une certaine façon, toutes les scènes ont déjà été faites au cinéma. Notre boulot sera simplement de les faire un peu mieux. » (Kubrick, Michel Ciment, Paris, Calmann-Lévy, 1999, p. 295). Alors que nous avons aisément accès à la connaissance accumulée depuis des siècles, il est difficile de prétendre que celle-ci n’existe pas.

Dans une entrevue qu’il accordait, Sam Mendes indiquait que le Dark Knight de Nolan avait été une révélation dans son approche du dernier James Bond : « The Dark Knight Skyfall:  New Bond Director Drew Inspiration From Nolan’s Batman. », Russ Burlingame, 19 octobre 2012). Mais, parallèlement, Darren démontre, dans son analyse, que le Batman de Nolan doit beaucoup à la franchise des James Bond : « What Bond Learned From Batman: The Dark Knight & Skyfall […] ». (Darren, them0vieblog.com, 26 octobre 2012). Il ajoute que ce jeu d’influence réciproque n’est pas à dédaigner si on en tire les bonnes leçons.

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Gérer vos concepts

François Cardinal commentait le film Promised Land pour lequel il écrivait sur son blogue : « j’ai simplement eu la confirmation de ce que je pense depuis longtemps : l’écologie fait rarement de bonnes œuvres, tout simplement parce que les convictions de l’auteur prennent toute la place aux dépens du récit.  » (« Terre promise : quand la fiction se met au service de l’écologie… », lapresse.ca, lundi 7 janvier 2013). Burlingame, citant de nombreuses règles d’écriture, indiquait : « Give your characters opinions. Passive/malleable might seem likable to you as you write, but it’s poison to the audience. » (Pixar and Joss Whedon’s Rules For Writers, Russ Burlingame, comicbook.com, 8 décembre 2012).

Nous sommes parfaitement en accord avec ces deux premières affirmations. Nous estimons, en effet, que donner son opinion par l’entremise de ses personnages fait disparaître la fiction au profit de l’essai, qui est nettement un autre genre littéraire. Il y a aussi une forme de fraude vis-à-vis du lecteur à qui on promet un moment de détente alors que l’on tente, lentement, de lui laver le cerveau avec nos lubies. 

Par ailleurs, nous croyons que la manipulation des concepts doit se faire tout aussi délicatement dans une œuvre de fiction. Ainsi, dans son analyse du film Dark Knight Rises, Sebala souligne que « The Dark Knight Rises suffers so mightily because it substitutes twists for character arcs, convenience for hard choices and flashbacks for discernible themes ». (Sound and Fury: ‘The Dark Knight Rises’ Against Theme and Story, Christopher Sebela, comicsalliance.com, 27 juillet 2012). Ainsi, nos bonnes idées peuvent venir écraser notre histoire au détriment de nos personnages et du récit que nous souhaitons poursuivre.

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Quel ton adopter

Corey Schroeder nous rappelle que : « Fast-forward to the 90s and you’ve got a new kind of Batman. Watchmen and The Dark Knight Returns have reinvented superheroes as real people with real flaws in the midst of stories that treat the audience’s intellect with maturity. » (« Are Superhero Comics Too Serious », www.comicvine.com, 14 septembre 2011). Chris Sims va plus loin que ce premier constat : « The imitators learned the wrong lessons, and instead of creating stories that treated their subject matter with intelligence and craft, which is a difficult matter requiring a great deal of skill, the knock-offs tried to recapture the things that were easy, like cussin’ and violence. They were exactly the same kind of escapist power fantasy that they were pretending to rise above, just wrapped up in cheap, meaningless exploitation and sold to the audience as something that wasn’t for little kids — which in itself is the most immature, teenage motivation something can possibly have. » (« What’s up With the 90s? », www.comicsalliance.com, 27 juillet 2012).

Cette analyse peut expliquer que certains se demandent si les aventures de superhéros n’étaient pas devenues trop violentes (« Sex & Violence », www.comicbookdaily.com, 9 décembre 2011). À notre avis, ce n’est pas la violence le problème. À cette époque, les aventures de Daredevil, de Frank Miller, avaient des représentations graphiques très violentes, mais cadraient très bien avec les ambiances recherchées. Notre principal reproche serait l’absence de recul face à cette violence. Si nous prenons la série télé 24, Jack Bauer avait le don de toujours torturer les criminels; nous n’avons pas de souvenir d’un innocent qui y ait été torturé. Nous avons davantage de malaise face à ce type de situation que la torture elle-même.

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Écriture et opinion politique (Partie I)

La sortie du dernier Batman (The Dark Knight Rises) a déclenché une vive polémique médiatique sur les intentions politiques de Christopher Nolan. Son Batman défendait-il des valeurs conservatrices? L’hystérie fut à son comble lorsque l’on fit une association entre le nom du méchant, Bane, et le nom de la société qu’avait fondée Mitt Romney (Baine Capital). Chuck Dixon, le cocréateur de Bane a dû faire une annonce publique pour réaffirmer sa foi conservatrice (Jozef Siroka, « Batman ne porterait pas le carré rouge », www.lapresse.ca, 24 juillet 2012).

Cette sortie en rappelait une autre, celle de Frank Miller qui avait dénoncé le mouvement Occupy dans des propos très durs. Une prise de position qui lui a été reprochée (Brent Chittenden, « Oh Frank Miller …Creators and Politics », www.comicbookdaily.com, 17 novembre 2011. « Watchmen Writer Alan Moore Set to Occupy Comics After Spat With Frank Miller », www.geeksofdoom, December 6th, 2011). Pourtant, comme le souligne Sara Lima, V for Vendetta demeure une excellente bande dessinée même si Alan Moore y revendique l’anarchie comme la meilleure forme de gouvernement (« Do Politics in Comics Alienate Readers? », www.comicvine.com, 6 octobre 2011).

Pour notre part, nous considérons qu’une œuvre artistique ne devrait jamais être écrasée par une métaphore politique ou sociale, ses personnages deviennent désincarnés et ont comme unique rôle d’être les porte-paroles de l’auteur. Si l’auteur veut passer un message politique ou social fort, autant écrire un essai.

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