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Stratégie

L’art de l’autopromotion

Dans des billets précédents, nous parlions de la tendance à l’autoproduction (le do it yourself). Nous plaidions que cette formule permettait d’éviter de payer des intermédiaires dont la valeur ajoutée pouvait être discutée. Parallèlement, nous admettions les limites de cette formule alors que l’on peut exceller sur toutes les facettes d’un projet de comicbook.

Todd Allen  stipule qu’une qualité majeure dans l’autoproduction est …l’autopromotion. « It depends a little on what your profile is and how good a person is at promoting themselves » («C2E2: Digital Comics: The Next Page», www.comicsbeat.com, April 29, 2014). Cet exercice n’est pas aussi simple à résoudre. Mark Waid qui est impliqué dans le projet Thrillbent, une plate-forme de diffusion de webcomics fait le constat suivant :

« There are four factors to selling anything: content, distribution, publicity, and marketing. We are great at content; we are good at distribution. Because of the limited amount of time in the day, however, marketing and publicity is where we fall down.  That’s no fault of the people at Thrillbent behind the scenes; that’s on me – I don’t have as much time as I’d like to pound the drum and get people to swarm to our site. » (« Interview: Mark Waid on the Inner Demons of Daredevil, Attitude Adjustment for the Hulk, and the Thrill of Digital Comics », www.comicsbeat.com, February 10, 2014).

Nous ne cherchons pas d’excuses, mais si l’effort de promotion présente ses limites pour un artiste établi comme Mark Waid, il devient un enjeu majeur pour le commun des mortels.

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Qu’est-ce qu’un digital comics?

Encore une fois, nous revenons à Mark Waid pour offrir une réponse à cette question. En fait, Waid précise ce que n’est pas un digital comics :

« Waid immediately jumped in, saying they aren’t cheap animation and that “motion comics are the devil’s tools.” His followup points demonstrated a thoughtful approach. He thinks that what makes comics comics is the reader’s ability to determine the pace of the story. The ability for the reader to fill in the voices and what happens in the gutters, using imagination, makes comics an immersive medium. » («C2E2: Digital Comics: The Next Page», www. comicsbeat.com, April 29, 2014).

En même temps, certains analystes considèrent qu’il est plus difficile de perdre de l’argent avec une édition numérique qu’avec une édition papier (Janelle Asselin, « The Economics of Digital Comics: Journalist And Educator Todd Allen On His Important New Book », www.comicsalliance.com, July 15, 2014). Personnellement, nous nuançons cette affirmation. Si vous faîtes tout de A à Z, nous concédons que le comicbook numérique sera plus économique. Mais quelle forme  souhaitez-vous donner à votre version digitale? Si vous ne reprenez que des architectures existantes, oui, vous économiserez. Cependant, la concurrence numérique est très intense et elle se joue à deux niveaux selon nous : 1) nous croyons que l’architecture numérique doit se démarquer de différentes façons permettant d’exploiter le plein potentiel d’Internet. 2) Internet impose une cadence de diffusion afin de capter et de conserver l’intérêt du lecteur. Et dans les deux cas, cela demandera des investissements.

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Prendre le temps de revenir sur nos pas

Il y a quelque chose que nous avons toujours trouvé agaçant à la lecture des comicbook, le besoin des auteurs de toujours prendre une page ou deux pour résumer les derniers événements. Pour nos premières expériences de lecture, nous sommes tombés au milieu d’aventures dont les ramifications remontaient quelques numéros auparavant. Nous nous sommes fait à cette situation. Cependant, plus récemment, nous avons lu cette entrevue de Mark Waid qui déclarait : « Every once in a while, you’ll get some criticism from a fan who goes, “Yeah, yeah. I know all about Mega Crime. Stop beating a dead horse.” And I’m thinking, “Look, it’s awesome you’ve been keeping up with the book, but have some mercy or compassion for somebody who might be picking it up for the very first time. » (Oliver Sava, Mark Waid on his personal digital-comics revolution», July 10, 2012, http://www.avclub.com)

Cette phrase a été comme une révélation et nous avons accepté d’intégrer un résumé précisant les ramifications antérieures du récit que nous développions actuellement. La question était : quelle forme prendre? Nous ne souhaitions pas nécessairement un simple résumé. En discutant avec l’un de nos collaborateurs, il nous a rappelé l’importance de notre ligne du temps et c’est cette dernière que nous avons voulu exploiter. Elle permettait d’intégrer quatre dimensions : un court résumé, quelques dessins clés et le moment des événements et préciser.

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L’autopromotion

Deux décennies avant qu’Internet ne permette des publications Web, Todd McFarlane avait identifié les principaux bénéfices de l’autoproduction : « I don’t got no lawyers. I don’t got no PR people. I don’t got no licensing people. I ain’t got shit! I hate to say it but I just proved that half those jobs at Marvel and DC are worthless. They could get rid of all of those guys and it’s not really going to affect the sales of their comic books, if you’re doing a comic book that taps into the heart of what the kids want right now. You don’t need a battery of people to produce big sales. What you need is a comic book that’s either good, glitzy, or happens to be tapping into whatever’s hot that week. » (Gary Groth, “…That’s the Spice of Life, Bud”: The Todd McFarlane Interview”, The Comics Journal #152, août 1992).

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Les efforts de promotion

Voici de larges extraits d’un article d’Hannah Means-Shannon qui rapportait les propos faits par différents intervenants commerciaux de diverses firmes de comics book lors du Wondercom 2013) :

  • Trying different approaches and continuing to do so as long as possible is key;
  • Knowing the pitch well, and the many angles from which it might be interpreted, breaking out of narrow genre definitions, for instance, may win the day;
  • You have to believe in what you’re selling” and believe that you are “one of the best advocates for it”.

Commercialiser ses personnages au risque de les fossiliser

Dans cette recherche du profit accessible grâce à des publications web, Mark Waid énonce un point de vue, fort intéressant : « Waid commented that the tendency toward merchandizing may encourage the slow-down or freeze of new developments in a character since “every character becomes a beach towel” in the end. » (Hannah Means-Shannon, “On the Scene: WonderCon 2013”, comicsbeat.com, 30 mars 2013.).

Ce simple commentaire met en relation les difficultés de la rentabilité financière avec les efforts d’intégrité artistique.

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Réparer ce qui n’est pas brisé?

Nous sommes tombés sur l’entrevue de Michael G. Wilson qui cherchait à expliquer comment le succès de la franchise James Bond. L’un des points qu’il amenait était que l’équipe avait cherché à réinventer le mythe avant qu’il ne soit trop éculé (Edaward Cross, « Skyfall exclusive: An Interview with Producer Michael G. Wilson », www.comicbookmovie.com, 13 février 2013). Du même souffle, Harvey Weinstein admettait qu’il avait commis des erreurs dans la promotion du film The Master, ce qui, selon lui, expliquait pourquoi celui-ci n’avait pas rejoint son public (Sean O’Connell, « Harvey Weinstein Admits He Mis-Marketed The Master », www.cinemablend.com, 29 janvier 2013).

Nous voyons dans ces deux affirmations une forme d’humilité qui permet, en admettant ses erreurs, de tirer des leçons pour de prochaines situations similaires.

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La viabilité des webcomics

Nous revenons sur des idées que nous avons déjà développées, mais avec de nouvelles références qui permettent d’enrichir nos réflexions. Brian Wood rappelle une vérité simple concernant le milieu du comic book : « This is a job. This is a business, not a hobby or a social activity. That may sound a little cold, and it doesn’t mean I don’t get immense creative satisfaction from doing what I do (if I didn’t, I’d go be a stockbroker or something) but it’s about finding the right balance. Not making business decisions based on being a fan, or social pressure, or making too many allowances for the quirks of this industry. » (Graem McMillan, “Wood: Comics is a Business, Not a Hobby of a Social Activity”, Newsarama, 2 janvier 2013).

Malgré ce constat, Falcon ajoute un élément important qui fait toute une différence, qui est l’idée d’un travail réalisé par une équipe : « Compared to other industries, I find it surprising and overwhelming how pedagogy and mentorship is so deeply ingrained as part of the comic book industry. I’ve seen creator after creator look at someone’s work and give advice and pass on years of wisdom because someone did it for them. Comic creators believe in returning kindness and helping aspiring talent. » (Anthony Falcone, “Breaking into the Comics the Marvel Way”, www.comicbookdaily.com, 30 mai 2013).

Malgré cela, l’aspect commercial ne peut pas être mis de côtè, car tout ceci occasionne des coûts, et ce, même si l’on édite soi-même sur le Web, car cela impose une cadence élevée de production et donc des coûts de main-d’œuvre non négligeables. (« Mark Waid on the true cost of digital », http://www.comicsbeat.com, 1er janvier 2013).

Dans cette logique de coût, même des artistes comme Mark Waid s’interrogent sur les moyens à prendre pour générer des revenus (« Holiday Interview #22 – Mark Waid », www.comicsreporter.com, 22 janvier 2013). Dans la même entrevue, Waid voit le déplacement de l’industrie vers une relation plus directe et plus personnelle entre le créateur et ses fans. Dans ce contexte, comment générer des revenus de masse sans perdre cette dimension d’échanges directs?

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L’avenir de la bande dessinée à l’ère d’Internet – Partie IV

Finalement, le format digital permet au créateur d’exercer un contrôle plus complet sur son œuvre. Il a accès à une plate-forme de diffusion pour un coût bien moindre que celui qui serait exigé par un réseau de distribution traditionnel.

En contrepartie, le créateur doit se transformer en entrepreneur (Bruce Lidl, « 2012: Year of the artist-entrepreneur? », comicsbeat.com, 6 janvier 2012). Avec le contrôle de son œuvre vient un risque plus grand, et le créateur doit maintenant prendre une part plus active dans la promotion. Encore plus important, selon nous, il doit développer un modèle d’affaires qui lui permettra de vivre de son art.

L’avenir de la bande dessinée à l’ère d’Internet – Partie III

Une diffusion digitale peut être une occasion de rééquilibrer la valeur accordée à la bande dessinée aux yeux du lecteur, et ainsi d’élargir son lectorat traditionnel de la bande dessinée. Selon les résultats d’un sondage : « Interestingly the survey did indicate that 57% of the digital readers did read print comics, while just 16% of the print readers had purchased or read digital comics. Also of interest are the top reasons that readers preferred one format or the other.  Digital readers preferred reading comics digitally because they provided immediate access (which could mean that many of these readers don’t have access to a convenient comic shop), and they also like the convenience and easy storage and portability of digital comics. ») (« DC Retailer Survey Results: Older, Male, Middle-class, Avid », comicsbeat.com, 10 février 2012). Selon cette affirmation, les marchés digital et physique s’adresseraient à deux segments de lecteurs relativement différents. Encore faut-il ne pas craindre ce nouveau canal de diffusion.

Neil Gaiman explique qu’il a commencé à s’intéresser au piratage de ses œuvres sur Internet alors qu’il abordait le sujet sous l’angle de la violation de son copyright. Très vite, en étudiant le sujet, il s’est rendu compte d’un fait étrange : les ventes augmentent dans les régions dans lesquelles ses bandes dessinées sont piratées. C’est en Russie, par exemple, qu’elles sont le plus diffusées illégalement et c’est aussi là qu’elles sont le plus vendues.

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Intrigué par ce phénomène, il a convaincu son éditeur de se livrer à une expérience : rendre American Gods, une de ses BD les plus populaires et qui se vend toujours très bien, accessible gratuitement sur Internet pendant un mois. À l’issue de cette expérience, les ventes de la série ont augmenté de 300 %. (« Neil Gaiman explique son point de vue sur le piratage », www.comicsblog.ff, 19 août 2012).